Le point (provisoire) sur les complications cardiovasculaires de la Covid-19

Sous le sceau du provisoire, cet article fait le point sur les complications cardiovasculaires dans la COVID-19, tout en sachant que les 45 articles passés en revue (uniquement en langue anglaise) souffrent de plusieurs limitations : forte hétérogénéité dans la sélection des patients, les résultats, les comparateurs et la conception des études ; faible nombre de patients inclus ; risque élevé de biais ; embouteillage au portillon «

publications » sous forme de pré-impressions, avant examen par des pairs…

Vous reprendrez bien un peu de physiopathologie

Protéine présente à la surface des cellules épithéliales alvéolaires des poumons et des entérocytes de l’intestin grêle, l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2) a été proposée comme site d’entrée pour le SARS-CoV-2. 

L’ACE2 décompose l’angiotensine II qui est un facteur pro-inflammatoire dans le poumon. L’inhibition de l’ACE2 peut être un autre facteur de lésion pulmonaire, ainsi que la cause de l’inflammation systémique avec libération de cytokines qui peut entraîner un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) et un dysfonctionnement de plusieurs organes. La perturbation de la régulation du système immunitaire, l’augmentation de la demande métabolique et l’activité pro-coagulante expliquent probablement une partie du risque accru d’effets indésirables chez ceux souffrant de maladies cardiovasculaires (MCV) liées à la Covid-19. Plus précisément, l’inflammation systémique peut déstabiliser les plaques vasculaires, tandis que la maladie virale accroît l’activité des cytokines, augmentant la demande cardiaque, comme dans le cas de la grippe. Cependant, des recherches récentes ont suggéré que le virus peut également causer des dommages directs au cœur en utilisant les récepteurs ACE2 situés dans le tissu cardiaque.

Un risque accru de mortalité chez les patients aux antécédents de MCV

La prévalence des MCV chez les patients atteints de la Covid-19 est difficile à déterminer, d’autant que des MCV préexistantes peuvent être associées à une forme de Covid-19 plus grave. Une méta-analyse portant sur 1 527 patients Covid-19 montre que la prévalence de l’HTA est de 17,1 % et celle des cardiopathies de 16,4 %, et que ces patients sont plus susceptibles de nécessiter des soins intensifs. Une autre étude portant sur 44 672 patients Covid-19 montre que des antécédents de MCV sont associés à une augmentation de près de cinq fois du taux de létalité par rapport aux patients sans MCV (10,5 % versus 2,3 %). D’autres études suggèrent des résultats similaires avec un risque accru de mortalité chez les patients ayant des antécédents de MCV.

Atteintes myocardiques et myocardites

Des infections virales antérieures, dont le MERS-CoV, ont été associées à des lésions myocardiques et à des myocardites avec élévation de la troponine, que l’on pense être dues à un stress physiologique cardiaque accru, à une hypoxie ou à un effet myocardique direct.

L’une des premières narrations de lésions myocardiques associées au SARS-CoV-2 concernait 41 patients Covid-19 à Wuhan, dont 5 (12 %) présentaient une élévation de troponine I de haute sensibilité, supérieure au seuil de 28 pg/mL. 

Des études suivantes ont montré que des lésions myocardiques avec un taux élevé de troponine peuvent survenir chez 7 à 17 % des patients hospitalisés pour Covid-19 et chez 22 à 31 % de ceux admis en en soins intensifs-réanimation. Des myocardites ont également été identifiées en association avec des charges virales élevées, avec mise en évidence d’infiltrats mononucléaires lors de l’autopsie de patients atteints de COVID-19. Une autre étude a suggéré que 7 % des décès par Covid-19 étaient dus à une myocardite.

La myocardite aiguë : un défi diagnostique majeur au cours de la Covid-19

La myocardite aiguë se joue dans une gamme variable de gravité clinique et constitue un défi diagnostique important au cours de la Covid-19 : douleurs thoraciques, dyspnée, arythmie, dysfonctionnement ventriculaire gauche aigu. Toutefois, en cas de myocardite et de lésions myocardiques, les valeurs de troponine sérique sont anormales. 

L’ECG peut mimer un syndrome coronarien aigu (SCA). Les anomalies de l’ECG résultent d’une inflammation du myocarde et comprennent des anomalies non spécifiques du segment ST-T, une inversion de l’onde T et des déviations du segment PR et du segment ST (sous décalage et élévation). Difficile alors de différencier myocardite et SCA. 

L’échocardiographie est davantage susceptible de montrer une dyskinésie segmentaire de la paroi lors d’un SCA actif et significatif, tandis que les formes graves de myocardite liée à Covid-19 ne s’accompagnent soit d’aucun défaut de mouvement de la paroi, soit d’une dyskinésie globale. Les anomalies de l’ECG et de l’échocardiographie dans le cadre de la Covid-19 sont des marqueurs de la gravité de la maladie et sont corrélées à un plus mauvais pronostic. De plus, les élévations de troponine chez les patients Covid-19 ont été directement associées à un plus mauvais pronostic.

Infarctus du myocarde

La forte inflammation systémique augmente le risque de migration de la plaque d’athérome et d’IDM. Une étude réalisée en 2018 a montré que la grippe et d’autres maladies virales étaient associées à un risque accru d’IDM au cours des 7 premiers jours, avec un taux d’incidence de 6,1 pour la grippe et de 2,8 pour les autres viroses. Une autre étude portant sur des patients hospitalisés pour une pneumonie communautaire a révélé un risque accru de MCV active qui restait présent pendant plusieurs années après l’hospitalisation. En raison d’une inflammation étendue et d’une hypercoagulabilité, le risque d’IDM est probablement présent chez les patients Covid-19.

Pour ne rien arranger, le traitement de l’IDM est controversé chez les patients COVID-19. En cas d’IDM avec sus-décalage du segment ST (STEMI) et Covid-19, l’ American College of Cardiology (ACC) déclare que si la fibrinolyse peut être envisagée chez les patients présentant un “STEMI à faible risque” – défini par un STEMI inférieur sans atteinte ventriculaire droite ou un IDM latéral sans instabilité hémodynamique – la coronarographie interventionnelle reste le traitement de choix, avec équipements de protection individuelle et décontamination complète de la salle de cathétérisme. 

En cas d’absence de sous-décalage (NSTEMI), il est recommandé de procéder à des tests à visée diagnostiques avant le cathétérisme. L’ACC dit que chez les patients correctement sélectionnés dont la Covid-19 est confirmée, un traitement conservateur peut être suffisant. Enfin, les patients hémodynamiquement instables dans le cadre d’un NSTEMI doivent être pris en charge de la même manière que ceux qui présentent un STEMI.

Insuffisance cardiaque aiguë et cardiomyopathie

L’insuffisance cardiaque aiguë peut être la principale manifestation de la Covid-19 parfois d’emblée présente chez 23 % des patients Covid-19, avec une cardiomyopathie chez 33 % d’entre eux, selon une étude. Une autre étude montre que l’insuffisance cardiaque touche 24 % des patients et est associée à un risque accru de mortalité. Parmi ceux en insuffisance cardiaque, près de la moitié n’avaient pas d’antécédents connus d’HTA ou de maladie cardiovasculaire. On ignore actuellement si l’insuffisance cardiaque est due à une nouvelle cardiomyopathie ou à l’exacerbation d’une insuffisance cardiaque non diagnostiquée auparavant. Il est important d’être pleinement conscient de ce dysfonctionnement cardiaque potentiel lors du remplissage vasculaire. Enfin, un bonheur n’arrivant jamais seul, une insuffisance cardiaque droite peut se surajouter, en particulier lors du SDRA.

Arythmies

Les palpitations peuvent être présentes chez plus de 7 % des patients Covid-19. Le plus souvent, une tachycardie sinusale est observée qui résulte de causes multiples et simultanées (hypoperfusion, fièvre, hypoxie, anxiété, etc.). Une étude montre une arythmie chez 17 % des patients hospitalisés et 44 % des patients admis en soins intensifs-réanimation. Lorsque ces arythmies sont associées à une élévation du taux de troponine sérique, il faut évoquer des lésions myocardiques (myocardite aiguë, SCA) comme diagnostic différentiel.

Thrombo-embolies

Il existe un risque accru de maladie thrombo-embolique (MTEV). Inflammation systémique, altérations de la coagulation, défaillance multi-viscérale sont autant de facteurs contribuant au risque accru de MTEV. Plusieurs études suggèrent des anomalies significatives des voies de la coagulation chez les patients Covid-19, y compris un taux élevé de D-dimères. Une étude portant sur 25 patients atteints de pneumonie à Covid-19 montre un taux élevé de D-dimères chez tous les patients avec une médiane de 6,06 microgrammes/mL, 10 patients présentant une embolie pulmonaire diagnostiquée par angiographie pulmonaire et TDM…

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