Bénéfices du régime méditerranéen pendant la grossesse

En 2022, les Centers for Diseases Control and Prevention’s ont signalé un accroissement de la mortalité liée à la grossesse aux USA ces 30 dernières années, avec des différences notables selon l’origine ethnique et l’âge de la mère. Des travaux antérieurs avaient alerté sur la fréquence de régimes alimentaires médiocres en période péri-conceptionnelle chez les femmes états-uniennes. A l’inverse, le régime méditerranéen est associé à un moindre risque de pathologies chroniques et de mortalité. N. Makareh et coll ont évalué l’impact d’un régime alimentaire de type méditerranéen alternatif (aMed), adapté à la population américaine, sur l’incidence des évènements pathologiques en cours de grossesse.
Une étude de cohorte sur près de 8 000 femmes enceintes
Les données fournies par une vaste cohorte nationale multicentrique de femmes enceintes, la Nulliparous Pregnancy Outcomes Study : Monitoring Mother-to-Be, ont été utilisées. Au total, 10 038 femmes nullipares avec grossesse unique, ont été incluses lors du premier trimestre de grossesse entre le 1er octobre 2010 et le 30 septembre 2013, suivies jusqu’ à l’accouchement. La cohorte finale était composée de 7 798 femmes (âge moyen 27,4 ans [ET 5,5] ans) pour lesquelles des données sociodémographiques et médicales ont été collectées. Leurs habitudes alimentaires ont été enregistrées lors de la visite initiale puis à la 13ème semaine de grossesse via le questionnaire semi quantitatif modifié Block 2005 Food Frequency (FFQ) qui évalue les ingesta durant les 3 mois précédents. A partir du questionnaire FFQ un score aMed est déterminé prenant en compte la consommation de légumes, fruits, noix, céréales complètes, légumineuses, poisson, ratio graisses mono-insaturées/saturées, viandes rouges et transformées, alcool, qui s’échelonne de 0 à 9, un score plus élevé s’approchant plus du régime méditerranéen. La survenue d’événements pathologiques en cours de grossesse (hypertension et diabète gestationnels, pré éclampsie et éclampsie, prématurité avant 37 semaines, poids de naissance inférieur au 5ème percentile, mort à la naissance) a été analysée en fonction du régime alimentaire à l’aide de modèles multivariés.
Moins d’événements pathologiques
Parmi les 7 798 femmes incluses, le score moyen aMed était de 4,3 [ET 2,1] ; 38,2 % d’entre elles avaient un score bas (0-3) et 30,6 % un score élevé (6-9). Ces dernières étaient plus âgées, blanches non hispaniques, fumaient moins souvent, avaient un bon niveau d’éducation et un indice de masse corporelle plutôt bas.
La prévalence des événements pathologiques
durant la grossesse était de 31,9 % en cas de score aMed élevé versus 38,2 % s’il était bas (p<0,001). Dans les modèles multivariés, les femmes avec un score aMed élevé par rapport à bas ont eu une probabilité inférieure de 21 % de survenue d’un événement pathologique pendant la grossesse (Odds Ratio OR 0,79 ; intervalle de confiance à 95 % IC 0,68-0,92]) ; pour la prééclampsie l’OR était de 0,72 (IC : 0,55-0,93) et de 0,63 (IC : 0,44- 0,90) pour le diabète gestationnel. Aucune association significative n’a été trouvée avec la survenue d’une hypertension gestationnelle, d’une prématurité, d’un petit poids de naissance ou une mort fœtale.
Une relation dose-réponse inverse entre score aMed et incidence des événements pathologiques a été mise en évidence, inchangée après analyses de sensibilité incluant la pauvreté ou le bénéfice d’une assurance de santé. Dans le détail, une association inverse est retrouvée pour la consommation de légumes (OR 0,83 [IC : 0,74-0,93]), de fruits (OR 0,89 [IC : 0,80-1,00]) et de poissons (OR 0,86 [IC : 0,77-0,96]). L’effet protecteur d’un score aMed élevé était d’autant plus marqué que l’âge maternel était plus élevé : aOR 0,52 [IC : 0,33-0,81] après 35 ans versus 0,85 [IC : 0,73-0,99] pour les moins de 35 ans (p = 0,04).
Au total, cette vaste étude prospective incluant des femmes enceintes états-uniennes d’origines géographique et ethnique diverses, confirme qu’une adhésion plus élevée à un régime alimentaire méditerranéen durant la grossesse est corrélée à un moindre risque de survenue d’une éclampsie, d’une prééclampsie ou d’un diabète gestationnel, d’autant plus que l’âge maternel est avancé. Ces résultats rejoignent ceux d’études antérieures. Cette association pourrait être le fait d’une diminution de l’adiposité, d’un meilleur profil glycémique, d’une baisse de la pression artérielle, de l’inflammation , de l’insulino-résistance, voire d’ une amélioration de la fonction endothéliale. Parmi les limites de ce travail, même si les critères d’évaluation du régime alimentaire étaient rigoureux, on peut noter que les questionnaires étaient auto rapportés, engendrant un risque de biais et d’erreurs de classification. De plus, les participantes ont toutes été suivies dans des centres universitaires et, enfin, l’étude était observationnelle, ne pouvant établir un lien de causalité.
En conclusion, le régime alimentaire de type méditerranéen durant la grossesse semble avoir un rôle dans la préservation de la santé materno-fœtale. Des études à long terme seront nécessaires pour préciser ces résultats.
Source : JIM