Hypercoagulabilité dans les formes sévères de Covid-19, est-ce une CIVD ?

 

Des complications thrombo-emboliques ont été décrites chez des patients atteints d’affections sévères à Covid-19. Une étude française (Llitjos et coll) limitée à 26 patients hospitalisés en unité de soins intensifs et sous ventilation mécanique, anticoagulés, a rapporté une incidence de 69 % (n = 18) d’événements thrombo-emboliques veineux (ETEV) avec 23 % (n = 6) d’embolies pulmonaires (EP). Des explorations angiographiques réalisées chez 25 patients (Oudkerk et coll.) ont mis en évidence des déficits de perfusion par obstruction de vaisseaux sous-segmentaires, réalisant une embolie pulmonaire chez 40 % (n=10) d’entre eux. Des signes de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) sont mis évidence chez la majorité des patients décédés d’infection sévère à Covid-19.

Ces patients présentent des critères de sepsis, avec une augmentation du risque d’ETEV du fait d’un alitement prolongé, de traitements corticoïdes, justifiant la recommandation d’une anticoagulation.

La société internationale de thrombose et d’hémostase (ISTH) a proposé de distinguer une phase précoce de CIVD associée au sepsis appelé coagulopathie induite par le sepsis (SIC, sepsis induced coagulopathy) et le bénéfice d’une anticoagulation a été confirmé chez les patients ayant les critères de SIC.

L’étude rapportée par Tang et coll est rétrospective, portant sur 441 patients adultes hospitalisés à Wuhan pour Covid-19 sévères (sur 1 786 cas confirmés). L’infection virale était affirmée par la détection de l’ARN du SARS-CoV-2. La sévérité de l’atteinte était définie (selon les critères nationaux chinois) par une fréquence respiratoire > 30/min et/ou une SaO2 inférieure ou égale à 93 % et/ou un PaO2/FiO2 inférieure ou égal à 300 mm Hg.

L’ISTH suggère de déterminer un score de SIC à partir de la numération plaquettaire, le TP-INR, et le score SOFA ( sequential organ failure assessment ) portant sur 6 dysfonctions d’organes. Les patients étaient d’âge moyen 65 ans, avec au moins une affection chronique sous-jacente chez 60,6 % d’entre eux (HTA 39,4 %, diabète 21,7 %, cardiopathie 9,1 %). Une héparinothérapie pendant au moins 7 jours a été instituée chez 22 % des patients. Parmi les patients classés en formes sévères, 21,6 % avaient un score SIC supérieur ou égal à 4.

Les patients ont survécu pour 70,2 % d’entre eux tandis que 27,8 % sont décédés, sans différence de mortalité à J28 entre patients héparinés et non-héparinés.

Mortalité fonction du taux de D-Dimères et de l’héparinothérapie

Une analyse statistique multivariée a montré que TP-INR et D-Dimères étaient des facteurs indépendants positivement corrélés à la mortalité à J28 et que les plaquettes y étaient négativement corrélées. Chez les patients ayant un score SIC supérieur ou égal à 4, la mortalité était inférieure en cas d’administration d’héparine (40 % vs 64,2 %), alors qu’il n’y avait pas de différence pour les scores SIC < 4. Lorsque les patients sont stratifiés selon leur taux de D-Dimères, la mortalité se maintient au même niveau chez les patients héparinés, tandis qu’elle augmente lorsque le taux de D-Dimères augmente chez les patients non-héparinés. Chez les patients ayant des D-Dimères > 3 µg/ml (6 fois la normale), l’héparinothérapie réduit la mortalité de 20 % (32,8 % vs .52,4 %).

Cependant l’efficacité du traitement anticoagulant dans la CIVD associée au sepsis est controversée, et le score SIC a été développé par l’ISTH pour guider le traitement anticoagulant au cours du sepsis. Mais dans le cas de Covid-19 sévères, l’atteinte virale est essentiellement limitée aux poumons et la coagulopathie observée n’est peut-être pas identique à celle d’un sepsis.

Dans les Covid-19 sévères, l’augmentation des D-Dimères, marqueur indirect d’une activation de la coagulation, suggère un bénéfice de l’héparinothérapie. Chez les patients n’ayant pas d’augmentation des D-Dimères, la mortalité relativement élevée des patients recevant de l’héparine pourrait s’expliquer par une augmentation du risque d’invasion virale alors qu’il n’y a pas de coagulopathie.

L’anticoagulation ne bénéficie qu’à des patients sélectionnés

Ainsi, cette étude tend à démontrer que, au cours des Covid-19 sévères, l’anticoagulation ne bénéficie qu’à des patients sélectionnés qui ont un score SIC supérieur ou égal à 4 ou qui ont des D-Dimères augmentés.

La physiopathologie de la CIVD est complexe et multifactorielle, résultant de l’interaction entre facteurs plasmatiques procoagulants, plaquettes, cellules endothéliales et cellules du système lympho-histiocytaire. Le virus infecte l’hôte en se fixant sur des récepteurs présents sur…

Pour en savoir plus rendez-vous sur : JIM

 

actusantemag

Site santé

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :